rencontre Ne pas démolir est une stratégie
Rencontre autour de la question de l’héritage des grands ensembles, le manque de logements et la perspective de démolitions programmées à la cité de Saige de Pessac.
dimanche 18 septembre, 16:00
au sein de l’exposition commun, une architecture avec les habitants
avec
Jean-Philippe Vassal architecte, Lacaton & Vassal
Renaud Epstein sociologue,
l’amicale des habitants de la cité de Saige
Christophe Hutin architecte et commissaire de l’exposition
entrée libre
dans le cadre des Journées européennes du patrimoine et du matrimoine 2022
Lacaton & Vassal
Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal se sont rencontrent à la fin des années 1970 pendant leur formation à l’École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux. Anne Lacaton obtient une maîtrise en urbanisme à l’Université Bordeaux Montaigne (1984), tandis que Jean Philippe Vassal s’installe au Niger, en Afrique de l’Ouest, pour pratiquer l’urbanisme, c’est là que commence la genèse de leur doctrine architecturale, profondément influencée par la beauté et l’humilité de l’économie des ressources dans les paysages désertiques du pays.
À Niamey, au Niger, Anne Lacaton et Jean Philippe Vassal réalisent leur premier projet commun, une paillote construite avec des branches de brousse locales, cédant au vent moins de deux ans après son achèvement. Ils se jurent alors de ne jamais démolir ce qui pourrait être racheté, mais plutôt de rendre durable ce qui existe déjà, s’étendant ainsi par addition, respectant le luxe de la simplicité et proposant de nouvelles possibilités.
Ils fondent l’agence Lacaton & Vassal à Paris en 1987. Pendant plus de trois décennies, ils conçoivent des logements privés et sociaux, des institutions culturelles et universitaires, des espaces publics et des stratégies urbaines. Leur architecture reflète leur engagement pour la justice sociale et la durabilité, en donnant la priorité à la générosité de l’espace et à la liberté d’utilisation grâce à des matériaux économiques et écologiques.
Le bien-être physique et émotionnel fait également partie intégrante de leur travail. L’application des technologies de serre pour créer des conditions bioclimatiques a commencé avec la maison Latapie à Floirac, France (1993). En utilisant le soleil, en harmonie avec la ventilation naturelle, la protection solaire et l’isolation, ils ont créé des microclimats ajustables et souhaitables.
Qu’il s’agisse de nouvelles constructions ou de transformation de bâtiments, le respect du préexistant est authentique dans leur travail. Une résidence privée au Cap Ferret, en France (1998), a été construite sur un terrain non aménagé le long du bassin d’Arcachon, dans le but de perturber le moins possible l’environnement naturel. Plutôt que d’abattre les 46 arbres du site, les architectes ont entretenu la végétation indigène, en surélevant la maison et en construisant autour des troncs qui la traversaient, permettant ainsi aux occupants de vivre parmi la vie végétale.
Lacaton et Vassal explique que « le préexistant a de la valeur si l’on prend le temps et l’effort de le regarder attentivement. Il s’agit d’observer, d’aborder un lieu avec un regard neuf, de l’attention et de la précision… de comprendre les qualités et les manques, et de voir comment on peut changer la situation en gardant toutes les valeurs de l’existant. »
Leur sélection habile de matériaux modestes permet aux architectes de construire des espaces de vie plus grands à un prix abordable, comme le démontre la construction de 14 résidences unifamiliales pour un ensemble de logements sociaux (2005), et de 59 unités au sein d’immeubles d’appartements de faible hauteur aux Jardins Neppert (2015), tous deux à Mulhouse, en France ; et dans des immeubles de moyenne hauteur adjacents composés de 96 unités à Chalon-sur-Saône, en France (2016) ; entre autres.
Tout au long de leur carrière, les architectes ont rejeté les plans de la ville prévoyant la démolition des logements sociaux, se concentrant plutôt sur la conception de l’intérieur vers l’extérieur pour donner la priorité au bien-être des habitants et répondre à leurs désirs d’espaces plus grands. Aux côtés de Frédéric Druot et Christophe Hutin, ils ont transformé 530 logements au sein de trois bâtiments du Grand Parc à Bordeaux, en France (2017), afin de mettre à niveau les fonctions techniques mais surtout d’ajouter de généreux espaces flexibles à chaque logement sans déplacer ses résidents pendant la construction, et en maintenant la stabilité des loyers pour les occupants. » Nous ne voyons jamais l’existant comme un problème. Nous regardons avec des yeux positifs car il y a une opportunité de faire plus avec ce que nous avons déjà […] Nous sommes allés dans des endroits où des bâtiments auraient été démolis et nous avons rencontré des gens, des familles attachées à leur logement, même si la situation n’était pas des meilleures. Ils étaient le plus souvent opposés à la démolition car ils souhaitaient rester dans leur quartier. C’est une question de bienveillance ». La Fundació Mies van der Rohe leur décerne le Prix de l’Union européenne pour l’architecture contemporaine (2019) avec Frédéric Druot et Christophe Hutin pour la transformation du GHI.
En 2021, Anne Lacaton et Jean Philippe Vassal remportent le Prix Pritzker.
Renaud Epstein
Renaud Epstein, né en 1971 est docteur en sociologie (ENS Cachan) et maître de conférences en sciences politiques de l’Université de Nantes. Il est membre du laboratoire Droit et changement social, chercheur associé à l’Institut des sciences sociales du politique (ENS Cachan) et enseignant à Sciences Po. Il a débuté sa carrière au Comité pour la réorganisation et la déconcentration des administrations puis à la DDE du Val d’Oise, avant de rejoindre en 1995 la coopérative Acadie comme consultant jusqu’en 2004.
Consultant indépendant depuis 2004, il effectue des missions de recherche, d’évaluation et de conseil pour des administrations et des collectivités. Parallèlement, il enseigne à Sciences Po (Master « Stratégies territoriales et urbaines ») et rédige une thèse intitulée « Gouverner à distance : la rénovation urbaine, démolition-reconstruction de l’État » sous la direction de Patrice Duran (ENS Cachan). En 2009, il est nommé maître de conférences en sciences politiques de l’Université de Nantes
Spécialiste des politiques urbaines (politique de la ville, rénovation urbaine, aménagement du territoire) et de l’évaluation des politiques publiques, ses projets de recherche portent sur les transformations de la gestion publique des territoires.